Il Divo (2008)
L'histoire de l'Italie à travers la vie et la carrière d'un homme : Giulio Andreotti
(...) Paolo Sorrentino revient à faire du cinéma directement politique en Italie (Il caimano étant un savant mélange de politique et de privé). Il fait un choix difficile même s'il a décidé de toucher une cible facile : Andreotti. L'homme d'État qui a été défini de temps en temps, le Sphinx, le Bossu, le Renard, le Pape Noir, Belzébuth et, bien sûr, le Divin Jules s'est certainement prêté à devenir le symbole d'une réflexion sur les maux de notre pays. Le choix était cependant difficile car Sorrentino avait derrière lui au moins trois noms dont s'inspirer et dont se distinguer stylistiquement dans sa redécouverte du cinéma engagé : Francesco Rosi, Elio Petri, Giuseppe Ferrara. Le premier avec sa rigueur dans le reportage, le second avec un visionnaire mordant, le troisième avec sa chronique dramaturgiquement efficace.
Sorrentino réussit l'opération. Il déclare, consciemment ou non, ses dettes envers les auteurs évoqués dans la phase initiale du film qu'il innerve immédiatement avec un grotesque qui devient sa lecture personnelle du personnage et de ceux qui l'ont entouré et soutenu. (Giancarlo Zappoli Mes films)
Le film décolle très vite, chargé d'adrénaline comme un opéra rock très noir, une version italienne apocalyptique de The Wall. La première image est la tête d'Andreotti percée par des épingles d'acupuncture à l'aube, l'heure du loup, tandis que sa voix murmurée hors écran récite De Profundis pour tous ceux épuisés par le pouvoir qui n'existe pas : « C'est parti toujours comme ça. Ils m’ont prédit la fin. J'ai survécu. Ils sont morts. D’un autre côté, j’ai combattu de terribles maux de tête toute ma vie. En son temps, l'Optalidon suscitait de nombreux espoirs. [...] (Piera Detassis Ciak)
[...] Le résultat d'un mélange calibré entre document et invention. Où c'est l'invention, la libre utilisation de la matière ou sa manipulation créative qui donne la force au film. Les personnes les plus proches de Giulio Andreotti, les dirigeants de son mouvement, expriment une aura sinistre et sombre qui est une conséquence de l'interprétation artistique mais ne perd pas pour autant sa fiabilité.[...]Un film complexe, discutable comme toute œuvre il touche à des sujets si sensibles, où le personnage le plus célèbre de toute l'histoire républicaine, caricaturisé des millions de fois pour ses caractéristiques physiques indubitables, nous apparaît pour la première fois dans sa dimension humaine énigmatique et dans sa stature de Nosferatu moderne. Le forçage, les inventions, ne manquent pas de nous livrer un portrait dense, réaliste et inoubliable. Le maximum de subjectivité déformante produit le maximum de document. Comme ce fut le cas avec La dolce vita. (Roberto Nepoti La Repubblica)
Quelle grandeur le Divo, Giulio Andreotti, révèle dans le film de Paolo Sorrentino en compétition à Cannes. Le charme du « mal à l'italienne » se reflète dans sa parabole descendante, celle du leader de DC, sept fois Premier ministre, surnommé par les surnoms les plus imagés. «Beelzebub» se détache dans l'ombre des couloirs du Palazzo Chigi avec le corps raidi et courbé de Toni Servillo, excellent entre Bagaglino et Nosferatu. Une vague de rires a traversé le public de la presse à l'égard des "goodfellas", les supporters d'Andreotti. [...] (Mariuccia Ciotta Il Manifeste)
Grands rires au début, attention concentrée, applaudissements intenses à la fin. La star de Paolo Sorrentino passe inaperçue dans la presse internationale. Cela n'a pas été facile, compte tenu de ce qu'il raconte et des images qu'il utilise, fortes et parfois grotesques. [...]Cirino Pomicino nouveau ministre qui se lance et se permet une longue et enfantine glissade dans la Transatlantique de Montecitorio. Le corps de Roberto Calvi, président de Banco Ambrosiano retrouvé pendu en 1982 à Londres, semble debout et nous regarde. [...] (Fabio Ferzetti Il Messaggero)
Comme c'est agréable d'avoir entre les mains un personnage "spectaculaire" comme Giulio Andreotti. La célébrité. [...] C'est un itinéraire politique qui marque l'histoire de l'Italie de l'après-guerre à nos jours, même si le film le reprend de 1992 à il y a quelques années. Période dominée par le cynisme étonnant d'une de nos phrases : « Personne ne sait combien il faut aimer Dieu pour comprendre qu'il faut perpétrer le Mal pour sauvegarder le Bien ». [...] (Lino Patruno La Gazzetta del Mezzogiorno)